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Pierre Lary (Neuilly s/Seine, 18/4/2005)
Savez vous quelque chose à propos de la maison de Pradier à
Bougival qu'il aurait habitée dans les dernières années de
sa vie et où il aurait été frappé d'apoplexie au cours
d'un déjeuner sur l'herbe?
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Douglas Siler (20/4/2005)
En fait, Pradier n'a jamais habité Bougival! Au
moment de son décès il était domicilié quai Voltaire,
n° 1, à Paris, où il occupait depuis 1838 un
appartement au 2e étage
avec vue sur la Seine et sur le Louvre. Il est vrai pourtant
qu'il est mort au cours d'une excursion à Bougival et
qu'il a souvent séjourné non loin de là, à
Ville-d'Avray, où il possédait une maison de campagne.
Le récit le plus exact de sa mort se trouve dans une
lettre adressée en 1897 à son petit-fils, Francis Pradier,
par son ami genevois Paul Marin, qui l'accompagnait ce
jour-là, le 4 juin 1852, chez Eugène Forcade (1820-1869),
financier, publiciste et collaborateur de la Revue des
Deux-Mondes. Étaient également de la partie son
élève Noémi Constant, son ancien élève Eugène
Guillaume, sa plus jeune fille Thérèse (12 ans) et
l'institutrice de celle-ci, Adeline Chômat. Partis en train
de la gare Saint-Lazare, ils descendirent à Bougival vers
13h30. Mais leur hôte n'étant pas encore prêt à les
recevoir, l'idée fut émise et acceptée d'aller voir, à
2-3 km de là, la machine hydraulique de Marly. C'est alors
que Pradier, resté en arrière avec Adeline Chômat, fut
terrassé par une attaque d'apoplexie. On le transporta dans
la maison de Forcade où ses amis, de retour vers 3 heures, le
trouvèrent sans connaissance, étendu sur un lit. Selon
l'acte de décès il expira à 10h30 du soir, rue de
Mesmes n° 150, à Rueil, ce qui était
vraisemblablement l'adresse de Forcade. Cette maison
existe-t-elle encore? J'aimerais bien le savoir! Quoi qu'il en soit,
la rue a probablement changé de nom.
Quant à Ville-d'Avray, Pradier y avait achété dès 1830 une
propriété avec une grande maison mais il fut contraint de
la vendre en 1849. Il y fit bâtir en 1831, à
côté de la maison, qui, je crois, était louée ou
abandonnée, un « pavillon à l'italienne » qui
lui servait de résidence lors de ses séjours dans la
propriété. Ce pavillon figure sur un dessin exécuté
par Jacques-Auguste Régnier et publié par lui dans ses Habitations
des personnages les plus célèbres de France, depuis 1790
jusqu'à nos jours (6 livraisons à partir de 1832). Il
existe encore aujourd'hui, agrandi, et se trouve à une
centaine de mètres de l'église de Ville-d'Avray. La
dernière fois que je l'ai vu il abritait une halte-garderie.
Tout ceci est documenté dans le catalogue de l'exposition
Statues de chair ainsi que dans mon édition de la Correspondance
de Pradier, Librairie Droz,
Genève (voir surtout t. I, p. 299, note 1; t. 2, p.
3-4; et t. 3, p. 173, n. 5). Par ailleurs, la lettre de Paul
Marin est citée dans mon article « James Pradier et
ses amis genevois les Marin » paru en 1979 dans la
revue genevoise Genava, t. XXVII. Enfin, vous
pourrez éventuellement lire sur le Forum Pradier - dès
que j'aurai le temps de l'écrire! - un article relatif
aux domiciles et aux ateliers de Pradier.
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Pierre Lary (20/4/2005)
Merci de m'avoir
répondu avec tant de précision et de rapidité. Dans le
« journal » de mon arrière-arrière-grand-mère,
une note parlait de la mort de Pradier au cours de ce
déjeuner sur l'herbe auquel elle semblait avoir participé.
En tant qu'amie? Ou voisine? (A l'époque, elle habitait à
Port Marly.) ... Je ne manquerai pas de consulter les
ouvrages que vous m'indiquez.
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Douglas Siler (21/4/2005)
L'internet étant une mine inépuisable de renseignements de tout
genre, je viens d'y identifier la rue où se trouvait la maison dans
laquelle Pradier est décédé. Son nom original,
de Mesmes, était celui de l'ancien propriétaire du
domaine qu'elle traversait, domaine acheté en 1813 par
l'Impératrice Joséphine. Elle suivait en partie le tracé de
l'actuelle rue Yvan Tourgueneff, nommée d'après
l'écrivain russe Tourgueneff (on orthographie aussi
Tourguéniev) qui y a vécu de 1874 jusqu'à sa mort en
1883. Tourgueneff y fit construire, à côté de la villa de la célèbre
cantatrice Pauline Viardot, son amie de longue date, un chalet de
style mi-russe, mi-suisse, dit « Les Frênes », dont
l'adresse, de son vivant, était rue de Mesmes n° 16, à
Bougival. Cette
datcha Ivan Tourquéniev abrite actuellement le
musée Tourguéniev, situé toujours au n° 16.
Le compositeur Georges Bizet a habité de l'autre côté de la rue
(côté Seine), au n° 1 (n° 5 actuel), où il composa la
plus grande partie de Carmen, avant d'y mourir le 3
juin 1875, trois mois après l'insuccès de la première
représentation de son chef-d'œuvre. Vous trouverez une
description et des images de sa maison sur le site
Les amis de Georges Bizet.
L'ancienne rue de Mesmes est devenue aujourd'hui une grande
avenue à quatre voies dont les deux voies du côté de la datcha Tourgueneff conservent l'appellation rue Yvan Tourgueneff sur les communes de Bougival et de
Rueil-Malmaison tandis que les deux voies en sens inverse
changent de nom sur la commune de Rueil-Malmaison pour
s'appeler avenue Napoléon Bonaparte.
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Cliquez pour agrandir
Avenue Napoléon-Bonaparte (à gauche) et rue Yvan Tourgueneff (à droite) sur la commune de Rueil-Malmaion
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Or, Pradier étant mort dans une maison située, selon son acte de décès, au n° 150 de la rue de Mesmes à Rueil, cette maison devait se trouver assez loin des maisons qu'allaient occuper Bizet et Tourgueneff, aux nos 1 et 16 respectivement, soit dans l'actuelle rue Yvan Tourguéniev, soit dans l'actuelle avenue Napoléon Bonaparte. Il faut espérer que des recherches plus approfondies dans les archives de Rueil-Malmaison permettront un jour de l'identifier ou, du moins, si elle n'existe plus, de préciser son emplacement.
Je serais très curieux de savoir ce que votre
arrière-arrière-grand-mère a écrit au sujet de la mort de Pradier
et comment elle s'appelait son nom
marié et son nom de jeune fille. Pourriez-vous me
transcrire la note de son journal?
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A lire aussi :
→ Étude: Le tombeau de Pradier au cimetière du Père-Lachaise
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