En 1850, Pradier décide dentreprendre
Homère et son guide, un groupe quil
compte tailler dans un grand bloc de marbre. Il y songe
peut-être déjà au cours de lannée précédente car le
catalogue de la vente après décès, en juin 1852, précise
que louvrage « est le fruit dun travail
persévérant de plusieurs années ». Le 16 janvier
1852, se fondant sur le modèle en plâtre, haut de 92 cm,
quil vient dachever, il sollicite de lEtat
« un marbre pour exécuter à [s]es frais un groupe
dHomère et son petit conducteur de la proportion de 7
pieds de hauteur», soit environ 210 cm. La mort en décidera
autrement.
Louvrage revêt pour Pradier une
signification particulière. Il sinsère dans la série
des grandes statues héroïques exécutées au cours des
dernières années de sa vie: Sapho debout (Salon de
1848), Médée (Salon de 1850) et Sapho assise (en
travail depuis 1850, Salon de 1852), auxquels auraient dû
faire suite Ulysse relevant le corps dAchille,
entrepris en 1848 et pour lequel, encore en 1852, le
sculpteur sollicite en vain un bloc de marbre et le Soldat
de Marathon, dont il achève le modèle en plâtre avant
de mourir.
Homère, comme les deux Sapho, est une
méditation sur lartiste incompris, rejeté par son
entourage. Après avoir été comblé de commandes
officielles importantes jusque dans les années 1845, Pradier,
tout en jouissant dune situation financière
confortable et des honneurs réservés à un membre de
lInstitut, estime ne plus être apprécié à la mesure
de son talent. Effets de lâge, de la maladie, des
graves problèmes conjugaux? Effet sans doute aussi de
lattitude de la critique qui se montre moins attentive
à ses travaux quelle ne lavait été auparavant
et qui ne cesse de lui reprocher dêtre seulement un
brillant exécutant, incapable de toute pensée profonde.
Pradier devant le buste d'Homère
Pradier partage son admiration envers Homère avec la plupart
de ses contemporains comme avec lensemble des hommes du
monde occidental. Déjà dans les premières années de sa
carrière, alors quil était pensionnaire de la Villa
Médicis, il en avait dessiné le portrait.
Les plus anciens portraits imaginaires de
lauteur de lIliade et de lOdyssée
remontent au IIe siècle avant J.-C. 1. Lun deux montrait le poète dans son
grand âge, les yeux éteints dans des orbites profondément
creusées, le front dégarni mais auréolé dune
chevelure et dune barbe aux boucles animées, ceint
dun fin bandeau. Cet uvre hellénistique, perdue,
est connue par de nombreuses répliques romaines. Lune
est une tête en marbre du Musée de Naples, provenant de
lancienne collection Farnèse 2. Une autre, conservée au Musée du Capitole avant
dêtre emportée à Paris en 1797 par Napoléon 3, est un buste en hermès, devenu célèbre en France (ill. 1).
Sur lun de ses plus anciens dessins connus, Pradier se
représente, assis sur une chaise, le ciseau dans la main
gauche et un maillet dans la droite, devant un buste d'Homère
posé sur une selle. Derrière lui se tiennent une jeune
femme et un jeune homme de ses amis. Tous regardent le
spectateur du dessin et non le buste dont on ne voit
quune moitié. Un chien pose son museau et ses pattes
sur la cuisse du sculpteur 4 (ill. 2).
Le jeune artiste exécute ce portrait à Rome, en 1817, pendant
son séjour à la Villa Médicis.
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2. James Pradier, Lartiste devant un buste dHomère, 1817. Dessin. Bayonne, Musée Bonnat.
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Sur la base du buste en hermès figurent une lyre en bas-relief
et l'inscription «HOMERE». Sa face latérale droite est
ornée dune couronne votive en relief. Le poète est
représenté en vieil aveugle, les yeux fixes, les orbites
creusées, la barbe bouclée, selon limage canonique.
Pradier se dépeint en train de travailler à
un ouvrage en marbre (le ciseau et le maillet quil met
dans ses mains ne seraient pas adéquats pour un plâtre ou
une terre), bien quil ait lattention attirée
ailleurs et bien que louvrage paraisse complètement
terminé, prêt tout au plus à recevoir encore une signature.
Mais son dessin ne montre probablement pas une uvre
réelle de sa main, encore moins quelque moulage
daprès lantique. Il se veut plutôt un hommage
au génie dHomère sous la tutelle duquel se place le
jeune sculpteur. De nombreuses représentations du buste
dHomère sont ainsi des invocations au génie de la
poésie: depuis la grande peinture de Rembrandt Aristote
devant le buste dHomère 5 (ill. 3)
au portrait de Winckelmann par Anton von Maron (1733-1808)
où figure, derrière le savant, au fond de sa chambre, un
portrait dHomère qui est précisément un buste en
hermès, de profil, dont on ne voit quune moitié,
comme dans le dessin de Pradier 6 (ill. 4).
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3. Rembrandt, Aristote devant le buste dHomère, 1653. Huile sur toile,
New York, Metropolitan Museum of Art. |
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4. Anton von Maron, Portrait de Winckelmann, vers 1785. Huile sur toile. Weimar, Schlossmuseum. |
A la quête d'un sujet : du poète triomphant au mendiant
Malade, ayant rédigé son testament, Pradier songe une
nouvelle fois à Homère. Il souhaite lui dédier une grande
sculpture. Nous ignorons tout des idées qui lui viennent à
ce propos. Il a certainement été ému par « LAveugle »,
un poème des Bucoliques dAndré Chénier, paru
à titre posthume en 1829, qui redonne les grandes lignes du
texte dHérodote sur la vie de laède, et sans
doute passe-t-il en revue les diverses façons dont les
artistes lont représenté.
Dans Le Parnasse, une fresque
réalisée vers 1511 dans la Salle de la Signature au Vatican
(ill. 5 et 5bis), Raphaël place Homère au
sommet de sa composition, debout, déclamant, entouré de
Dante et de Virgile. Il est richement vêtu et sa tête
barbue est couronnée de lauriers. Son regard fixe est celui
dun aveugle, ses traits ceux dun homme âgé,
mais en pleine possession de ses moyens.
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5. Raphaël, Le Parnasse, vers 1511. Fresque. Rome, Palais du Vatican, Salle de la Signature. |
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5bis. Raphaël, Le Parnasse (détail), vers 1511. Fresque. Rome, Palais du Vatican, Salle de la Signature. |
Cette vision triomphale du poète inspire les artistes tout
au long des siècles. John Flaxman (1755-1826), notamment, la
reprend sur une plaque en « Jasperware »,
modelée en 1776 pour la manufacture de Wedgwood (ill.
6), sur laquelle Homère, tenant sa lyre, sapprête à
monter sur les marches dune estrade entourée
dallégories qui proclament son triomphe 7.
Elle culmine dans LApothéose
dHomère, peinte en 1827 par Dominique Ingres (1780-1867)
au plafond d'une des salles du Musée Charles X au Louvre 8 (ill. 7) et dans la décoration de la
coupole de la bibliothèque du Palais du Luxembourg,
réalisée entre 1840 et 1846 par Eugène Delacroix (1798-1863).
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6. John Flaxman, Apothéose dHomère, 1776. Céramique de la manufacture de Wedgwood. Londres, British Museum. |
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7. Dominique Ingres, LApothéose dHomère, 1827. Huile sur toile. Paris, Musée du Louvre. |
Pradier choisira-t-il plutôt de montrer le
vieil aveugle chantant en saccompagnant de la lyre?
Hérodote mentionne à plusieurs reprises quHomère, au
cours de ses pérégrinations, avait ouvert des écoles de
poésie en diverses cités. Pier Francesco Mola (1612-1666)
imagine cet enseignant, richement vêtu, assis sous un arbre,
chantant et saccompagnant d'une viole de gambe. Auprès
de lui, un jeune étudiant note ses paroles 9 (ill. 8). Peint à Rome vers 1660, son
ouvrage connaît un vif succès dont témoignent ses
nombreuses répliques et variantes, comme aussi des copies
par dautres artistes, tel un beau dessin dHonoré
Fragonard 10. On peut supposer quil suggéra à Rembrandt
son émouvant portrait d'Homère 11 (ill.
9), peint en 1663, dans lequel le vieil homme, habillé
dune pelisse, la tête ceinte dun bandeau, dicte
ses vers à deux jeunes gens qui figuraient en bas, à droite
du tableau, avant quil ne fût coupé. Mais,
contrairement à Mola, Rembrandt ne met aucun instrument de
musique dans les mains du poète.
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8. Pier Francesco Mola, Homère chantant, vers1660. Huile sur toile. Rome, Galleria nazionale darte antica, Palazzo Corsini. |
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9. Rembrandt, Portrait dHomère, 1663. Huile sur toile. La Haye, Mauritshuis. |
Cette façon de représenter Homère chantant,
seul, saccompagnant ou non dun instrument, ne
permet de distinguer le poète dautres musiciens que
par son grand âge et par la fixité de son regard.
Cest le cas du portrait composé par Mattia Preti (1613-1699)
qui figure Homère, toujours richement et élégamment vêtu,
couronné de lauriers, les yeux levés au ciel, jouant du
violon 12 (ill. 10). Cette toile fut, comme celle de
Mola, lobjet de plusieurs répliques et variantes et
inspira d'autres artistes.
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10. Mattia Preti, Homère jouant du violon, vers 1665. Huile sur toile. Venise,
Galleria dellAccademia.
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Les sculpteurs - quand ils ne se limitent pas au portrait en
buste - donnent généralement dHomère une statue le
représentant seul, debout ou assis et jouant de la lyre.
Ainsi isolé, le poète apparaît à la manière dun
héros. Il sinscrit dans la tradition de la série des
statues des « Grands hommes de la France »,
initiée en 1776. La plus ancienne semble être la statue
présentée au Salon de 1802 par Philippe Laurent Roland (1746-1816),
intitulée Homère chantant ses poèmes. Elle
nest plus connue aujourdhui mais pourrait
correspondre à une petite esquisse en plâtre, représentant
le poète assis avec sa lyre, conservée à Valenciennes 13 (ill. 11). Au Salon de 1812, Roland
revient sur le sujet avec Homère jouant de la lyre,
marbre de grandeur nature 14 (ill.
12), magnifiant le poète à la façon dun héros
antique, debout, nu, drapé seulement dun pan de tissu
tombant de lépaule gauche pour voiler le sexe.
Laède joue de la lyre et chante. Il a posé son bâton
contre une stèle couronnée placée derrière lui, tandis
quune seconde couronne gît à ses pieds.
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11. Philippe Laurent Roland, Homère chantant ses poèmes, 1802 (?). Plâtre. Valenciennes, Musée des beaux-arts. |
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12. Philippe Laurent Roland, Homère jouant de la lyre, 1812. Marbre. Paris, Musée du Louvre. |
Lesquisse de Roland inspire sans doute
à Charles Antoine Callamard (1769-1821) une statuette
dHomère chantant, dans laquelle le poète,
assis sur un bloc de pierre, drapé dune étoffe qui
dégage à demi le torse, chante en s'accompagnant d'une
énorme lyre. La statuette nest connue que par une
figurine en biscuit éditée par la manufacture de
Sèvres entre 1807-1812 15 (ill. 13).
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13. Charles Antoine Callamard, Homère chantant, 1807-1812. Biscuit. Sèvres, Musée national de la céramique. |
Plus simplement, Charles René Laitié (1782-1862) compose,
pendant son séjour à Rome, une statuette dHomère
chantant qui le montre assis, trônant à la façon
dun dieu et tenant un thyrse dans sa main droite,
tandis que sa lyre est posée contre le siège. Un petit
bronze, présenté au Salon de 1827, porte la date de 1806
qui est vraisemblablement celle du modèle en plâtre 16 (ill. 14).
Homère chantant devant les bergers
Cette image dHomère seul manque daction et ne
permet guère dexprimer des sentiments. Les peintres
dhistoire de l'époque néoclassique lui ont préféré
celle du poète chantant devant un public plus ou moins
nombreux, au beau milieu d'un paysage ou sur les marches
dun édifice.
A lexposition de la Royal Academy de 1791, Thomas
Lawrence (1769-1830) présente une toile quil intitule Homer
reciting his Poems 17 (ill. 15)..
A lorée dune forêt, Homère, debout, tenant sa
lyre, déclame devant une foule installée au pied des arbres
et dans leurs frondaisons. La scène pourrait se passer dans
la campagne anglaise. Laède est en longue robe de bure,
plus chrétienne que grecque; les personnages qui
lentourent, peu attentifs à sa récitation, portent
des vêtements dont certains paraissent avoir été taillés
au XVIIIe siècle; au premier plan comme
collé dans la composition le jeune homme
presque nu, allongé, dans lequel les contemporains
reconnaissaient un fameux pugiliste londonien, ne saurait
guère évoquer le petit guide de laveugle.
Jean Pierre Saint-Ours (1752-1809) donne de cette scène une
image plus convaincante. Son Homère chantant
lOdyssée, peint en 1793 18 (ill. 16), est situé dans un paysage
arcadien.
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16. Jean Pierre Saint-Ours, Homère chantant lOdyssée, 1793. Huile sur toile. Vente Sothebys Zurich, 8 décembre 1994, n°4. |
Laède joue de la lyre et chante; son petit guide assis
à ses côtés le contemple. Un jeune homme et deux jeunes
femmes debout devant lui lécoutent. Le poète est
assis sous le buste en hermès de Minerve, placé sur une
stèle. Saint-Ours, rentré définitivement à Genève après
son long séjour romain, sidentifie à Ulysse revenu
dans sa patrie et prête à deux des auditeurs les traits de
sa propre fiancée et de son futur beau-frère.
Ce sujet bucolique suscite un grand nombre dautres
peintures et dessins dont nous ne retiendrons que trois
exemples. Un dessin de Pierre Narcisse Guérin (1774-1833)
montre Homère assis sur un rocher, à la lisière dune
forêt, chantant en s'accompagnant de la lyre tandis
quun jeune berger, assis auprès de lui avec sa brebis,
le regarde admiratif 19 (ill. 17). Un grand médaillon du Salon
doré de la Malmaison, peint à lhuile par Etienne Jean
Delécluze (1781-1863), présente Homère, assis à
lorée dun bois, buvant le lait dune
chèvre que deux enfants traient pour lui (ill. 18).
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17. Pierre Narcisse Guérin, Homère charme Glaucus par ses chants, vers 1810. Dessin. Valenciennes, Musée des beaux-arts. |
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18. Etienne Jean Delécluze, Homère, vers 1820. Huile sur toile. Château de la Malmaison. |
En 1845, Jean-Baptiste Corot peint Homère
et les bergers 20 (ill. 19), où laède, assis dans un
vaste paysage arcadien, chante devant trois bergers, selon
une composition inspirée peut-être du tableau de Saint-Ours
dont il a pu voir à Genève lune des versions.
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19. Jean Baptiste Corot, Homère et les bergers, 1845. Huile sur toile. Saint-Lô, Musée des beaux-arts. |
Homère chantant devant les Grecs
Dans le Liber amicorum de Jan Six, Rembrandt dessine,
en 1652, Homère récitant devant les Grecs. Il
esquisse la figure du poète, debout, au milieu
dauditeurs faisant cercle autour de lui. Cette pâle et
émouvante image 21 est la plus ancienne représentation de ce sujet.
En 1794, Jean Louis David (1748-1825) compose des dessins
pour Homère chantant sur une place publique dont il
entend faire une grande peinture 22. Lun montre le poète, assis sur les marches
dun escalier, qui déclame devant une foule admirative.
Des femmes déposent des offrandes dans un panier placé
derrière lui (ill. 20). A cette étude très
achevée répond un autre dessin (ill. 21). qui,
dans le même cadre architectural, montre Homère, couché
sur les marches de lescalier de la cour, complètement
seul, un chien assis à ses pieds. En 1794, David, après
avoir connu la gloire, est emprisonné par la Convention et
risque la mort. Il a tout lieu de sidentifier au poète
plongé dans ses pensées, ayant laissé sa lyre, abandonné
de tous, auquel seules deux femmes apportent un peu de pain.
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20.Jean Louis David, Homère chantant sur une place publique, 1794. Dessin. Paris, Musée du Louvre. |
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21. Jean Louis David, Homère couché sur les marches dun édifice public, 1794. Dessin. Paris, Musée du Louvre. |
Le sujet dHomère déclamant devant les
Grecs connaît un grand succès chez les peintres. Vers 1795,
Asmus Jakob Carstens (1754-1798) compose à Rome un grand
dessin 23 où laède debout chante devant les Grecs lui
faisant face. Une toile de Guillaume Guillon dit Léthière (1760-1832),
datée de 1811 24 (ill. 22), représente Homère assis au
bord dune route conduisant aux portes dune cité
grecque, chantant pour un groupe dauditeurs en
saccompagnant de la lyre. Derrière lui, son jeune
guide sest assoupi.
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22. Guillaume Guillon dit Léthière, Homère chantant devant les Grecs, 1811. Huile sur toile. Nottingham Castle. |
En 1834, lEcole des beaux-arts propose comme sujet du
Prix de Rome de peinture Homère chantant devant les Grecs.
Désormais le thème fait partie du répertoire de la
peinture européenne.
Par contre, il est très rare dans la sculpture avant 1875,
date à laquelle le sujet du Prix de Rome de sculpture était
« Homère, accompagné de son jeune guide, chante ses
poésies dans une ville de la Grèce » 25. Thorvaldsen, qui avait déjà taillé en 1790 un
buste dHomère 26 , compose en 1836 un grand relief avec Homère,
assis sur les marches dun temple, déclamant devant la
foule des Grecs 27(ill.
23). Parmi les auditeurs, tous debout, lartiste fait
son autoportrait (l'avant dernier personnage, à gauche).
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23. Bertel Thorvaldsen, Homère déclamant devant les Grecs, 1836. Relief en plâtre. Copenhague, Thorvaldsens Museum. |
Pradier nentend pas sengager dans cette voie.
Fait pour la peinture, ce thème narratif ne peut être
traité quen relief, un genre que le sculpteur semble
ne pas apprécier autant que la ronde bosse. Ne la-t-il
pas utilisé seulement que par obligation: pour son Prix de
Rome et pour des commandes monumentales?
Homère et son guide
Il va trouver son sujet dans une autre image dHomère,
celle de laveugle marchant dans la campagne,
accompagné dun personnage qui le protège ou le
conduit.
La vie dHomère, insérée à la fin du livre IX
des Histoires dHérodote, ne précise pas qui
lui servait de guide. Elle mentionne seulement le nom de
Glaucus, un berger de lîle de Chio qui avait secouru
Homère lorsque ce dernier avait été attaqué par des
chiens appartenant à des pêcheurs. Une terre cuite de
Clodion (1738-1814), datée de 1809, illustre cet épisode.
Elle montre le poète amplement drapé, sans sa lyre,
avançant malgré deux chiens qui le mordent aux jambes. Un
jeune homme nu, de la même taille que lui, le soutient et
fouette les animaux 28 (ill. 24). Le succès de la statuette
incite Jean Philippe Thomire à léditer en bronze vers
1820 29 et Jean Pierre Granger (1779-1840) en fait le sujet
dun tableau exposé au Salon de 1819 30 (ill. 25).
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24. Clodion, Homère mordu par des chiens, 1809. Terre cuite. Paris, Musée du Louvre. |
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25. Jean Pierre Granger, Homère et le berger Glaucus, 1819. Huile sur toile. Dijon, Musée des beaux-arts. |
Mais les artistes sattachent surtout au sujet
particulièrement touchant du vieil aveugle guidé par un
enfant 31.
François Gérard (1770-1837) compose Homère et son guide,
une toile datée de 1795, autrefois conservée à Saint-Pétersbourg
et quil présentera au Salon seulement en 1814 (ill.
26).
26. François Gérard, Homère et son guide, 1795.
Gravure par Auguste Desnoyers, 1806. Château de la Malmaison. |
Elle dépeint le poète, la lyre attachée dans le dos, qui
marche vers la droite en déclamant et qui sapproche
dangereusement du bord dune falaise. Il pose la main
droite sur lépaule de lenfant qui le précède
et dont les cheveux bouclés et la courte tunique sont
plutôt ceux dune adolescente que dun jeune
garçon. Le guide se retourne vers Homère pour
lempêcher de tomber dans la mer. Le tableau connaît
un tel succès quen 1797 Gérard en élabore le pendant
avec Bélisaire et son jeune guide. Les deux peintures
seront popularisées en 1806 par les gravures dAuguste
Desnoyers (1779-1857) 32.
Limage créée par Gérard fixe pour longtemps
liconographie dHomère guidé par un enfant 33. Une statuette anonyme, en bronze doré (ill.
27), en reprend les grandes lignes, faisant du poète un
philosophe âgé, sans lyre ni bâton, nu sous son manteau
rejeté sur les épaules en dégageant le torse.
Il marche pieds nus, posant la main droite sur lépaule
de lenfant qui se tient à sa droite. Celui-ci
savance dun pas vif et étend le bras gauche
comme pour montrer du doigt un obstacle et, en même temps,
arrêter les pas de laveugle. Son visage poupin, ses
cheveux bouclés, sa courte tunique flottant au vent et sa
démarche presque dansante pourraient le faire prendre pour
une fillette 34.
Une figurine en faïence vernissée, éditée autour des
années 1800 par la manufacture de Rouen 35 (ill. 28), dérive elle aussi de la
gravure daprès Gérard.
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28. Anonyme, Homère et son guide, vers 1809. Faïence vernissée. Sèvres, Musée national de la céramique. |
Modelée dans le style rustique qui caractérise
habituellement ce genre de production artisanale, elle
représente un vieil homme à la barbe finement taillée,
vêtu dune longue blouse et dun lourd manteau,
chaussé de bas et de gros souliers. Cet Homère des
campagnes françaises na pas de lyre et tient seulement
un bâton dans la droite en posant la gauche sur l'épaule
dun jeune garçon qui tend la main droite pour quérir
laumône. Lenfant porte une courte tunique et est
chaussé comme son maître.
En 1851, alors que Pradier achève son groupe dHomère
et son guide, Edward-Sheffield Bartholomew (1822-1858),
un sculpteur américain établi à Rome, compose un relief en
marbre représentant Homère marchant à grands pas une
allure qui nest pas précisément celle dun
aveugle , précédé de son guide 36 (ill. 29).
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29. Edward Sheffield Bartholomew, Homère et son guide. Marbre, 1851. New York, Metropolitan Museum of art. |
Le guide est ici une très jeune fille, avec de longues
boucles à langlaise et une courte tunique laissant
deviner ses seins naissants. Comme dans la toile de Gérard,
elle se retourne en regardant admirativement le vieil homme.
Analogies entre l'image d'Homère et celles de Bélisaire
et d'dipe
La vie et les campagnes militaires de Bélisaire, mort à
Constantinople en 565, sont connues par les Histoires
de Procope de Césarée, son contemporain. Nulle part il
ny est dit que ce grand stratège byzantin, général
des armées de Justinien, certes tombé en disgrâce à la
fin de sa carrière, ait été aveuglé sur les ordres de
lempereur et réduit à la mendicité. Cette fable,
forgée au XIIIe siècle en tant quexemplum, rappelle
que la vie est faite de hauts et de bas et propose en même
temps un modèle de courage dans ladversité.
Bélisaire forme ainsi le pendant dHomère: tous deux
sont vieux, aveugles et réduits à mendier, généralement
conduits par un enfant; tous deux restent dignes dans leur
malheur. Dans les représentations quen donnent les
artistes, les deux hommes ne se distinguent que par des
détails: la lyre dHomère, le casque de Bélisaire lui
servant à recueillir les aumônes ou le serpent qui menace
les pas de ce dernier.
Lhistoire de Bélisaire est relatée dans plusieurs
textes imprimés dès le XVIe siècle. Bélisaire publié à
Paris en 1767 par Jean François Marmontel (1723-1799)
connaît un grand succès et incite les artistes à en
représenter certains épisodes en se fondant sur des
peintures et des gravures du XVIIe siècle. Liconographie de
Bélisaire ayant fait lobjet de très nombreuses
études 37, nous ny reviendrons que pour rappeler deux
thèmes qui ont un rapport direct avec les images d'Homère.
Avant même de travailler à son Homère chantant devant
les Grecs, Jean Louis David peint en 1781 Bélisaire
reconnu par un soldat 38 (ill. 30).
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30. Jean Louis David, Bélisaire reconnu par un soldat, 1781. Huile sur toile. Lille, Palais des beaux-arts. |
Le tableau donne à voir Bélisaire, aveugle, pieds nus, mais
portant la cuirasse, assis sur les marches dun édifice
antique. Il serre un enfant dans ses bras. Celui-ci tend un
casque à une femme qui leur fait laumône. Un soldat,
étonné, contemple son ancien général. Le succès de la
toile au Salon de 1781 est tel que la composition de David
servira de référence aux innombrables représentations de
Bélisaire réalisées de Londres à Saint-Pétersbourg à la
fin du XVIIIe et tout au long du XIXesiècle.
Arrêtons-nous plus longuement sur les images de Bélisaire
guidé par un enfant qui forme un pendant à celles, à peine
plus anciennes, dHomère et son guide. Elles prennent
leur source dans lune des gravures daprès Hubert
François Gravelot (1699-1773) illustrant le Bélisaire
de Marmontel, paru en 1767. Celle du frontispice (ill.
31) représente le général aveugle marchant dans une
campagne semée de ruines, guidé par un enfant. Un serpent,
au pied dune colonne, guette les passants.Sinspirant de cette gravure, une statuette en
biscuit de « terre de Lorraine », modelée vers
1775 par Paul Louis Cyfflé (1724-1806), fait voir Bélisaire
guidé par lenfant, écrasant ce serpent sous son pied
droit 39 (ill. 32).
Gérard, dans la toile datée de 1797, déjà citée,
représente Bélisaire marchant droit devant lui en portant
sur son bras gauche lenfant mordu par le serpent encore
enroulé autour de sa jambe 40 (ill. 33). Elle forme le pendant de son Homère,
daté de 1795, décrit plus haut (ill. 26). Comme ce
dernier, elle sera popularisée par la gravure.
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33. François Gérard, Bélisaire et son
guide, 1797. Gravure par Auguste Desnoyers, 1806. Château de la Malmaison. |
Homère et Bélisaire partagent, dans limaginaire
occidental, le sort dun autre aveugle de
lantiquité, dipe, errant après s'être crevé
les yeux. Dans la célèbre tragédie de Sophocle, dipe,
chassé de Thèbes, senfuit jusquà Colone,
conduit par sa fille Antigone. Au contraire de sa
rencontre avec le sphinx, cet ultime épisode de son
existence est peu représenté dans les arts. A partir de la
fin du XVIIIe siècle, soit pratiquement au même moment où
Homère et Bélisaire deviennent des sujets à la mode, les
peintres et plus rarement les sculpteurs
sattachent à ce thème nouveau. Entre 1791 et 1814 les
livrets du Salon mentionnent pas moins de onze peintures
portant le titre dipe et Antigone ou dipe
à Colone. Une terre cuite de Charles Marin (1749-1834),
datée de 1807 41, décrit le malheureux père assis, sa fille
agenouillée auprès de lui, posant la tête sur ses genoux.
En 1828, Antoni Stanislaw Brodowski (1784-1832) peint dipe
et Antigone, une toile monumentale dans laquelle
laveugle, vêtu dun court manteau et tenant un
bâton dans la droite, marche en sappuyant sur sa fille
42 (ill. 34).
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34. Antoni Stanislaw Brodowski,
dipe et Antigone, 1828. Huile sur toile. Varsovie, Musée national. |
Pour la figure ddipe, le peintre polonais reprend
littéralement le Bélisaire de Gérard. Il avait
travaillé chez ce dernier à Paris, entre 1809 et 1814 et,
rentré à Varsovie, disposait sans doute des gravures
daprès les tableaux de son maître. Mais, alors que
Gérard donne à voir Bélisaire portant son jeune guide
blessé, Brodowski peint Antigone, debout auprès de son
père. La jeune fille, lourdement drapée, détourne la tête.
Elle semble extraite dune autre image, maladroitement
collée à celle de laveugle.
Homère et son guide par Pradier
Lorsquen 1850 Pradier entreprend le groupe quil
appelle « Homère et son petit conducteur » 43 (ill. 35-37), la tradition iconographique
du sujet est donc établie depuis près de cent ans.
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35. James Pradier, Homère et son guide, 1851-1852. Modèle en plâtre. Genève, Musée dart et dhistoire. |
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36. James Pradier, Homère et son guide, 1851-1852. Modèle en plâtre. Genève, Musée dart et dhistoire. |
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37. James Pradier, Homère et son guide, 1851-1852. Modèle en plâtre. Genève, Musée dart et dhistoire. |
Il na probablement pas vu la terre cuite de Clodion (ill.
24) et ne connaît sans doute pas la statuette de Cyfflé (ill.
32) relevant plus de l'art populaire que de la grande
statuaire. Mais il nignore rien des deux tableaux de
Gérard (ill. 26 et 33).
Sources directes
C'est à François Gérard (17701837) que Pradier doit
ses débuts et ses premières commandes. Peu après son
arrivée à Paris, le jeune homme est admis dans l'entourage
du peintre, auquel son frère Charles-Simon avait été
recommandé en 1810 et qui exécutera, dès 1812, plusieurs
gravures d'après certaines toiles du maître. Gérard,
membre de l'Institut et professeur à l'Ecole des beaux-arts
depuis 1812, tient pendant plus de trente ans l'un des plus
importants salons artistiques de Paris. Pradier en est un
familier et, en 1824 encore, déclare quil na
«pas d'autre maître» que lui 44.
Le sculpteur sinspire à la fois dHomère et
son guide (ill. 26) et du Bélisaire (ill.
33) de Gérard dont il a vraisemblablement les gravures dans
ses cartons. Sans aucunement copier ces documents vieux de
plus de cinquante ans, il en synthétise les deux
compositions: lattitude de son Homère est presque
celle du Bélisaire de Gérard, tandis quil vêt
et coiffe son guide comme le fait Gérard pour celui dHomère.
Dessins et esquisse plastique
Les gravures de Gérard servent seulement de déclencheurs au
projet de Pradier qui travaille intensément à
lélaboration de son groupe, comme le prouvent les
quinze croquis, dessins et calques conservés 45 qui fixent toute la variété des solutions
envisagées pour préciser son sujet. Il sagit de trois
grandes feuilles, exécutées avec soin au crayon,
détaillant les ombres comme si elles évoquaient des
sculptures imaginaires placées déjà sur leurs bases, et de
petits croquis tirés d'un carnet, souvent jetés sur les
deux faces de la page, formant de simples notes griffonnées
en quelques instants. Cet ensemble est le seul dans
luvre dessiné de Pradier qui permette de suivre
lévolution de la pensée de lartiste au jour le
jour et de pénétrer ainsi si profondément dans le
processus de la création dune de ses sculptures.
Un premier dessin (ill. 38) montre un Homère massif,
debout, torse nu, serrant sa lyre contre lépaule
droite et arrêté dans sa marche par le geste brusque de son
jeune guide au moment où le poète pose le pied sur un
serpent qui se dresse contre lui.
Lenfant, presque nu, se tient à sa droite. Dans un
léger croquis, en haut à gauche de la feuille,
lartiste cherche une position différente pour
lenfant. Les deux figures sont placées sur une base
rectangulaire portant la signature en majuscules « J.
PRADIER ». On se rappellera que lépisode du
serpent nappartient pas à la légende dHomère
mais fait partie de celle de Bélisaire. Lartiste
abandonne bientôt ce projet pourtant très élaboré, qui
lui paraît sans doute trop solennel.
Il cherche une autre façon de représenter le
poète et note, en huit petits croquis, denviron 12 x 9
cm (ill. 39-46), les idées qui lui viennent un peu
à la façon dun « brain storming ».
Sept se concentrent sur la seule figure dHomère vêtu
dun court manteau, toujours debout, la lyre suspendue
dans le dos ou pendant au bout de son bras gauche, parfois
sappuyant ou saccoudant à une stèle, à un
rocher ou à une souche. Dans le huitième (ill. 46), un croquis
jeté à gauche de la figure étudie l’enfant, tandis qu’un neuvième
(ill. 47) le montre debout à ses côtés.
Pradier synthétise le résultat de ces brèves notations sur
une grande feuille (ill. 48) où Homère, vêtu
dune courte tunique et dun manteau qui dégagent
les mollets et une partie de la jambe gauche, serre la lyre
contre lépaule droite.
Lenfant se tient debout, à sa gauche; une draperie lui
couvre le dos. Ici encore, de petits croquis marginaux
fouillent la position de lenfant. Dans langle
inférieur droit, lartiste détaille dun trait
plus incisif les éléments dune autre statue à
laquelle il est en train de travailler, la première version
de Sapho assise, destinée à lédition. Il
étudie la forme du tabouret sur lequel la poétesse est
assise et quelques ornements de son collier. Dans la version
éditée en bronze, il la dotera dailleurs dune
lyre en tous points semblable à celle quil prête à
Homère.
Enfin, un dernier dessin (ill. 49) représente
Homère debout, vêtu dun court manteau jeté sur
lépaule gauche, dégageant la partie droite du torse
et serré à la taille; dégageant aussi les mollets.
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49. James Pradier, Homère et son guide. Dessin. Paris, Ecole nationale des beaux-arts. |
Le poète a attaché sa lyre dans le dos au moyen dun
baudrier. Tête droite, jambes presque écartées, il tient
fermement son bâton et donne limage dun homme
résolu, droit et fier dont on croit difficilement quil
est un vieil aveugle mendiant. Lenfant est assis à sa
gauche sur un tas de pierres, tenant un très long bâton
entre ses jambes. Il écoute rêveusement laveugle et
laisse pendre la sébile quil tenait à la main. Le
groupe est placé sur une base moulurée, à la façon
dune sculpture. Il se détache sur un réseau de
hachures parmi lesquelles transparaît une énorme lyre que
laède serre contre son épaule gauche et dont la
position constitue une nouveauté prometteuse. En marge, deux
croquis étudient Homère sappuyant plus lourdement au
tas de pierres et lenfant assis, les jambes croisées.
Aucun des dessins et des croquis nannonce la solution
retenue par Pradier dans une (première?) esquisse en plâtre 46 (ill. 50), haute de 40 cm.
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50. James Pradier, Homère et son guide, 1851. Esquisse en plâtre. Aix-en-Provence, Musée Granet. |
Celle-ci se compose de deux figures arrivées à des stades
dexécution différents. Le poète est modelé avec
soin et déjà proche de ce que sera la composition
définitive (à quelques différences près: la tête est
droite, le corps est moins penché contre le rocher et semble
prêt à faire un pas en avant). La lyre, sommairement
traitée, est maintenant posée verticalement sur le rocher,
à gauche dHomère qui garde pourtant encore le
baudrier à lépaule. Jointe à cette figure
pratiquement achevée, celle de lenfant a toute la
spontanéité dun premier jet. Elle le présente les
jambes croisées, levant les yeux vers le poète. On y sent l'artiste
entièrement pris par le plaisir du pétrissage de la pâte,
du modelage par grosses boulettes écrasées à coups de
pouce ou par les doigts glissant sur elles pour les étirer
et les creuser de sillons. Les vides arrachés par les
mirettes, les profils marqués au couteau et les coups de
poinçon griffant un plan montrent la vigueur et la
célérité avec laquelle il agit pour établir les grandes
lignes et les plans de sa composition.
Pradier trouve cette esquisse de travail suffisamment
significative pour loffrir et la dédicacer en 1851 à
son jeune ami le peintre provençal Victor Chavet (1822-1906)
dont il modèle le buste en cette même année.
Modèle en plâtre: description, source antiques
Poursuivant lidée retenue pour lesquisse,
Pradier aboutit au grand modèle en plâtre, haut de 92 cm,
complètement achevé avant sa mort et portant la signature
« J. PRADIER 1852 » (ill. 51).
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51. James Pradier, Homère et son guide, 1851-1852. Modèle en plâtre. Genève, Musée dart et dhistoire. |
Homère et son guide font halte. Le poète, debout,
sappuie contre la lyre dressée verticalement sur un
rocher situé à sa gauche et pose le bras gauche sur le haut
de linstrument. Il est entièrement nu sous un drap
jeté sur lépaule droite qui retombe en plis amples et
lourds, sans voiler son nombril ni dissimuler les prémices
de la pilosité du sexe. De sa main droite, émergeant des
replis de ce qui lui sert de manteau, il tient ou
plutôt il effleure un long bâton noueux. Le poète
penche la tête en avant. Ses traits et sa chevelure sont
conformes aux bustes antiques, ceints du bandeau des aèdes.
Il se tourne un peu vers lenfant avec lequel, peut-être,
il converse. Le jeune guide aux beaux cheveux bouclés, lui
aussi complètement nu, assis à sa gauche sur le rocher, le
regarde intensément. Il croise les avant-bras sur le genou
gauche. Les plis de son mantelet, ramassé sur la cuisse
gauche, cachent son sexe. Lenfant retient à peine un
rameau dolivier dans sa main gauche.
Le sculpteur détaille les éléments de la lourde lyre en
bois, avec ses neuf cordes puissamment serrées par
dénormes chevilles, et son baudrier de cuir qui
retombe sur le rocher 47. Ce rocher, par contre, comme le sol, sont traités
sommairement.
Le groupe est une uvre de grande qualité.
Lartiste donne du corps de son héros limage
dun homme dans la force de l'âge, certes fatigué par
une vie difficile, mais nullement affaibli. Rien
névoque le vieillard décharné du célèbre Voltaire
nu de Houdon. Sans être un athlète, le modèle
professionnel choisi est de belle stature. Le sculpteur en
imagine le visage buriné par le vent des îles, mais non
ravagé par les années de mendicité, pensif, amer peut-être.
Par contraste, il accentue la perfection idéalisée du corps
et du visage de lenfant.
La composition est solide, ramassée en un cylindre qui
semble évoquer une colonne antique. De puissantes obliques
convergent vers le sol, accentuant la monumentalité des plis
du manteau. Le modelé est retenu, privilégiant de grands
plans tranquilles dans les anatomies auxquels répond la
sinuosité de la draperie. Lartiste ne relate pas
exactement une action mais, sans figer son groupe, transcrit
le moment où les deux personnages ont besoin de reprendre
leur souffle: l'enfant sest laissé tomber par terre,
le vieil homme, pensif, ralentit son pas alors quil a
déjà posé sa lourde lyre sur le haut du rocher. Ces
mouvements, non dépourvus de contradictions dans leur
succession temporelle, créent une certaine tension qui
contraste avec le caractère statique de lensemble.
Les deux figures font discrètement référence à
lantique. Lenfant nest pas sans rappeler
certains éléments du jeune Tireur dépine 48 et plus encore de lEnfant pêcheur 49 que le pensionnaire de la Villa Médicis a dessiné
attentivement au Vatican.
Homère se réfère dune façon allusive à lApollon
Sauroctone 50 qui sappuie contre un arbre situé à sa
gauche, en portant en avant et en levant le bras gauche.
Cette statue de Praxitèle est la source dinspiration
dinnombrables statues de personnages debout,
légèrement penchés sur le côté en croisant les jambes,
dont certains sappuient sur une lyre dressée à leur
gauche, sur une colonne. Cest le cas dune
réplique antique lourdement restaurée à la Renaissance et
transformée en Apollon 51 qui a joui dun certain succès et a sans
doute inspiré à Antonio Canova (1757-1822) sa Terpsichore,
réalisée en 1811 52, et à Bertel Thorvaldsen (1770-1844) lApollon 53 taillé en 1838. Mais Pradier, tout en gardant
lidée de ces dernières statues, croise à peine les
jambes dHomère. En outre, il couvre la moitié droite
du corps du lourd drap de laine quil utilise pour la
plupart de ses modèles. Ce drapé lui permet dopposer
le jeu des plis à un subtil modelé de l'anatomie, selon la
disposition adoptée déjà pour Phidias (1832), Phryné
(1844) et Pandore (1845), fournissant par une
coupure verticale deux vues dun même corps, drapé et
nu.
Fortune critique, édition
Homère et son guide, jamais exposé par Pradier, ne sera
vu que par les intimes de latelier: aucun ne le décrit
ou ne le mentionne. Seul le fidèle Canonge en cite
incidemment le titre à propos de la figure du Gardon à la
Fontaine de Nîmes: « Ce colosse [...est] une
production complètement à part dans l'uvre du maître;
c'était, comme il me le disait lui-même, un jalon dans sa
carrière, un premier pas vers une manière plus simple et
plus grandiose à laquelle il avait déjà préludé par le
modèle de son Polyphème; Pradier comptait la
manifester dans son Homère, et surtout par son beau
groupe d'Ulysse relevant le corps d'Achille. Ces
nobles rêves, une mort prématurée ne lui a pas permis de
les réaliser; ils rendent inappréciable la valeur du seul
travail que l'artiste a pu accomplir dans ce qu'on aurait pu
appeler sa grande manière. » 54
Le groupe ne sera visible à Paris quà loccasion
de la vente après décès. Acquis par la Ville de Genève en
1852, il est exposé au Musée Rath où il ne retient pas
lattention de la critique. De 1910 à 1950 environ, on
peut le voir dans la salle Pradier du Musée dart et
dhistoire. Le plâtre nest pas jugé digne
dêtre reproduit en bronze, comme le seront, en 1910, Ulysse
et Polyphème. Les premières photographies
nen sont publiées quen 1985, précédées par la
reproduction, parue à Genève en 1922 55, sans commentaire, dune assez médiocre
réduction en plâtre. Il disparaît dans lincendie de
1987.
Luvre longuement mûrie na donc pas été
considérée par les historiens de lart avant la belle
et savante notice que Jacques de Caso lui consacre en 1985 56.
Elle nest cependant pas passée inaperçue des amateurs.
Peu après la mort de Pradier, le mouleur parisien Salvatore
Marchi met sur le marché des réductions en plâtre, hautes
de 43 cm, dans lesquelles Homère est affublé dune
canne particulièrement ridicule (ill. 52). Il fait
en outre reproduire le plâtre en daguerréotype
stéréoscopique qui en propose une image
inversée 57 (ill. 53).
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52. James Pradier, Homère et son guide. Réduction en plâtre par Marchi. |
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53. James Pradier, Homère et son guide.
Photographie stéréoscopique dun plâtre édité par Marchi.
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Le modèle de sa réduction figure dans la vente quil
organise en 1856 accompagné dun tirage en bronze 58.
Diverses maisons parisiennes éditent également des bronzes,
hauts de 40 cm environ, fondus daprès une réduction
plus conforme à luvre originale (ill.
54-55).
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54. James Pradier, Homère et son guide.
Réduction en bronze. Genève, Musée dart et dhistoire. |
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55. James Pradier, Homère et son guide.
Réduction en bronze. Genève, Musée dart et dhistoire. |
Certaines fontes portent, à côté du nom de Pradier, la
date de 1852. Dautres nindiquent même pas qui en
est lauteur. Les plus soignées sont commercialisées
par E. de Labrouë ou par Duplan et Salles.
En Grande-Bretagne, des manufactures de «Parian ware»
éditent des réductions mesurant environ 34 cm de haut (ill. 56).
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56. James Pradier, Homère et son guide.
Réduction en « Parian ware ». Marché de lart en 2006. |
Elles diffèrent du modèle original par le
fait que lenfant regarde devant lui. Elles ne portent
pas de marque, ni même le nom de Pradier 59.
Postérité
Louvrage de Pradier est-il aussi passé inaperçu des
artistes? Bartholomew, qui en 1851 compose à Rome le relief
déjà cité dHomère et son guide (ill.
29), ne pouvait pas connaître le plâtre en train de naître
à Paris. Par contre, il semble légitime de se demander si
Johann Jakob Oechslin (1802-1873) en avait vu lune des
réductions circulant en Europe à partir de 1852, quand il
entreprit son Bélisaire 60.
En 1848, Heinrich Moser (1805-1874), ancien horloger à la
cour de Russie, revient à Schaffhouse, sa ville natale, et y
développe une industrie prospère. Jouant un rôle politique
important dans la cité, il commande en 1857 une statue en
marbre de Bélisaire conduit par son guide à son
compatriote Oechslin, formé dans latelier de Dannecker
à Stuttgart. Le sculpteur avait séjourné à Rome de 1824
à 1827, travaillant peut-être pour Thorvaldsen, et avait
bénéficié de plusieurs commandes pour des édifices civils
ou religieux en Suisse orientale. Il affirme avoir taillé
lui-même son Bélisaire dans le marbre, haut de 98 cm
(ill. 57), faisant précéder le modèle en plâtre
de dessins à la mine de plomb très poussés, dont huit sont
aujourdhui connus » 61. Rehaussés à la craie, ils étaient certainement
destinés à être soumis à son commanditaire (ill.
58). Ils témoignent dun souci obstiné du détail.
Tous partent dune conception générale qui semble
déjà fixée et qui pourrait avoir un rapport direct avec la
sculpture de Pradier.
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57. Johann Jakob Oechslin, Bélisaire conduit par son guide, 1859. Marbre. Schaffhouse, Museum zu Allerheiligen. |
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58. Johann Jakob Oechslin, Bélisaire conduit par son guide, 1857-1858. Dessin. Schaffhouse, Stadtbibliothek. |
Le marbre, daté de 1859, montre Bélisaire debout, pieds nus,
vêtu dun court manteau qui recouvre sa cuirasse,
tenant un long bâton noueux dans la droite. Il tourne son
visage vers sa gauche et pose la main sur lépaule de
lenfant qui est debout à sa gauche et qui lève la
main droite comme pour désigner le chemin. Le jeune
conducteur aux cheveux bouclés a la grâce dune
fillette. Sa courte tunique dégage partiellement le torse.
Il porte, serré contre lui, le casque destiné à recueillir
les aumônes.
La composition est statique, figée dans une symétrie
rigoureuse. Pour son général, le sculpteur se souvient de l'autoportrait
sculpté de Thorvaldsen 62 dont il reprend la pose, le costume et
lattitude décidée, jusquà la haute figure
debout sur laquelle il prend appui. Il insiste sur la
puissante anatomie du militaire aux larges épaules, fier,
hautain même, et encore habitué à donner des ordres. Le Bélisaire
dOechslin est bien plus ancré dans la tradition
néoclassique que l'Homère de Pradier, pourtant plus
ancien.
Il se pourrait aussi que Dominique Ingres (1780-1867) se soit
souvenu de la sculpture de Pradier quil avait
vraisemblablement vue chez le sculpteur, quand il peindra Homère
et son guide, une petite toile datée de 1861 quil
exposera dans son atelier en 1864 63 (ill. 59).
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59. Dominique Ingres, Homère et son guide, 1861. Huile sur toile. Bruxelles, Musées royaux. |
A cette époque, le peintre se préparait à réaliser une
réplique de son Apothéose dHomère (ill.
7). Du groupe, il ne retient que les bustes: le poète,
de face, tenant le bâton dans la main droite, serre contre
son épaule gauche lenfant qui le regarde.
Une dernière fois, semble-t-il, le groupe de Pradier suscite
lattention dun peintre: au Salon de 1874, William
Bouguereau (1825-1905) expose Homère et son guide 64 (ill. 60). Sa toile colossale montre le
poète marchant droit devant lui, la lyre au dos, le bâton
dans la droite, accompagné dun enfant. Limage
reprend pour la figure dHomère la composition de
Pradier en lenrichissant de force détails: le jeune
guide, debout, en tunique courte, un panier au bras, se
serrant contre le vieil aveugle, effrayé par un chien qui
aboie autour deux. Au loin, dautres chiens et des
hommes s'agitent, évoquant probablement, eux aussi,
lépisode de lîle de Chio 65
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60. William Bouguereau, Homère et son guide, 1874. Huile sur toile. Milwaukee, Art Museum. |
Le sujet dHomère et son guide retenu par Pradier pour
une sculpture quil voulait colossale nappartient
donc pas à une longue et ancienne tradition iconographique.
Il ne suscitera après lui que très peu dautres
uvres dart. Célébré par de nombreux bustes
depuis lantiquité et souvent représenté par les
peintres depuis la Renaissance, le grand poète est
lobjet seulement dun petit nombre de statues en
pied à lépoque modernes, dont les plus anciennes
connues ne sont guère antérieures aux années 1800.
Pradier trouve dans limage du poète aveugle, réduit
à la mendicité et conduit par un enfant qui, à lextrême
fin du XVIIIe siècle avait déjà séduit le
peintre Gérard, une réponse à ses propres interrogations
sur la place de lartiste dans la société.
Notes
1 Gisela M. A.
Richter, The portraits of the Greeks, Londres: Phaidon,
1965 (Homère. vol. I, pp. 45-56).
2 Naples,
Musée national darchéologie, 6023.
3 Paris, Musée
du Louvre, Ma 440. Marbre, h: 53 cm.
4 Bayonne,
Musée Bonnat, Nl 1126, 2370. Mine de plomb et estompe, 27,8
x 21,2 cm, signé et daté « J. Pradier statuaire 1817 ». Le dessin français du XIXe siècle,
cat. exp., Paris, Musée du Louvre, 1979, n° 111.
Reproduit dans James Pradier, Correspondance, textes
réunis, classés et annotés par Douglas Siler, t. 1, (17901833),
Genève: Droz, 1984, [cité désormais « Correspondance »].
Statues de chair. Sculptures de James Pradier (17901852),
cat. exp., Genève, Musée d'art et d'histoire, 1985 /
Paris, Musée du Luxembourg, 1986, n° 2, n. 3 [cité
désormais « Statues de chair, 1985»]. Claude
Lapaire, James Pradier et la sculpture française de la
génération romantique, catalogue raisonné, Milan: 5
Continents, 2010, n° 12 [cité désormais « Lapaire,
2010 »]. On notera que le chien pourrait bien être une
réminiscence de celui qui apparaît, dans la même position
et selon le même cadrage, dans le quadruple portrait de philosophes assis sous un
buste de Sénèque, peint par
Rubens vers 1614 et que Pradier na pas manqué de voir
lors de sa visite au Palazzo Pitti à Florence.
5 New York,
Metropolitan Museum of art, 61.198. Huile sur toile datée de
1653, 143,5 x 136,5 cm.
6 Weimar,
Schlossmuseum.
7 Londres,
British Museum.
8 Ce sont
aujourdhui les salles des collections
darchéologie au premier étage du Musée du Louvre.
Peinture détachée du plafond en 1855 et remplacée par une
copie. Loriginal est au département des peintures du
Louvre.
9 Rome,
Galleria nazionale darte antica, Palazzo Corsini. Pier
Francesco Mola, cat. exp., Rome, Musei Capitolini, 1989,
n° I 36.
10 Besançon, Musée des beaux-arts, D 2861.
11 La Haye, Mauritshuis, 584.
12 Venise, Galleria dellAccademia. Pier
Francesco Mola, cat. exp. Rome, Musei Capitolini, 1989,
n° IV 10.
13 Valenciennes, Musée des beaux-arts, S 87-10.
14 Paris, Musée du Louvre, MR 2088. Marbre, h: 212 cm,
signé et daté 1812.
15 Sèvres, Musée national de la céramique, 26370.
Biscuit, h: 44 cm.
16 Angers, Musée des beaux-arts, MTC 759. Bronze, h:
32 cm, signé et daté « Laitié Rome 1806 ».
17 Londres, Tate Gallery, TO 1974.
18 Genève, Musée dart et dhistoire, 1983-16.
Huile sur panneau 100,5 x 83 cm, signé daté 1793. Danielle
Buyssens, Musée dart et dhistoire, peintures
et pastels de lancienne école genevoise, Genève,
1988, n° 331. Nous reproduisons la réplique, 41 x 30,5 cm,
passée en vente, Sothebys Zurich, 8 décembre 1994,
n° 4.
19 Homère charme Glaucus par ses chants,
Valenciennes, Musée des beaux-arts.
20 Saint-Lô, Musée des beaux-arts, 80 x 130 cm.
Exposé au Salon de 1845.
21 Amsterdam, collection Six. Otto Benesch, The
drawings of Rembrandt, Londres: Phaidon, 1973, n°813.
Limage est trop pâle pour être reproduite ici.
22 Paris, Musée du Louvre, département des arts
graphiques 26079 et RF 789, 26 x 37 et 27 x 34 cm. Pierre
Rosenberg et Louis- Antoine Pratt, Jacques-Louis David (1748-1825),
catalogue raisonné des dessins, Milan: Leonardo, 2002,
n° 144 et 145.
23 Weimar Schlossmuseum.
24 Nottingham Castle.
25 Prix gagné par Jean-Baptiste Hugues, relief
conservé à lEcole nationale supérieure des beaux-arts.
26 Copenhague, Thorvaldsens Museum.
27 Plâtre, 98 x 198 cm, Copenhague, Thorvaldsens
Museum A 502, Marbre, Rome, Palazzo Torlonia.
28 La statuette est présentée au Salon de 1810 sous
le titre Homère, aveugle, chassé par les pêcheurs. Paris,
Musée du Louvre, RF 4392, h: 61 cm. Guilhelm Scherf, « Homère
mordu par les chiens », dans: Revue du Louvre,
1993, pp. 54-60. Guilhelm Scherf, « Clodion »
dans: Musée du Louvre. Nouvelles acquisitions du
département de sculpture 1992-1995, Paris: RMN, 1996, pp.
112-115.
29 Toledo Museum of art. Clodion, 1738-1814,
cat. exp. Paris, Musée du Louvre, 1992, fig. 43.
30 Homère et le berger Glaucus, Dijon, Musée
des beaux-arts.
31 Jamais les textes anciens ne prétendent quil
sappelle Glaucus ou Glaucos.
32 Homère, gravure dédiée à E. Q. Visconti,
Bélisaire dédiée à Talleyrand (toutes deux
Malmaison, château MM 2000.24.1 et MM 2000.24.2). Landon
reproduit au trait les deux toiles dans les Annales du
Musée: Homère 1814, pl. 65; Bélisaire 1832,
pl. 48.
33 Ont-elles inspire à David un dessin
aujourdhui perdu, mentionné dans le catalogue de sa
vente après décès (n° 47 « Homère, la lyre à la
main et conduit par son jeune guide » (cité par Pierre
Rosenberg et Louis- Antoine Pratt, Jacques-Louis David (1748-1825),
catalogue raisonné des dessins, Milan: Leonardo, 2002,
n° 144)?
34 Cologne, coll. part., h: 15,5 cm. Herbert Keutner,
« Der blinde Homer von dem Ziegenhüter Glaukos
geleitet », dans: Altersbildnisse in der
abendländischen Skulptur, cat; exp. Duisburg, Wilhelm
Lehmbruck Museum, 1996, pp. 157-159. Publiée comme étant
une uvre du début du XVIIIe siècle, nous estimons que, malgré son modelé
baroque, elle dérive de la composition de Gérard et doit
remonter seulement aux années 1800.
35 Sèvres, Musée national de la céramique, 26370.
Faïence vernissée, h: 31 cm. Éditée vers 1809.
Considérée à tort comme représentant Bélisaire, alors
que ne sont visibles ni le casque, ni le serpent qui le
caractérisent habituellement.
36 New York, Metropolitan Museum of art, 1996.74, 75 x
51 cm. Le jeune guide est identifié à tort comme étant le
génie de la poésie épique inspirant Homère.
37 Friedrich Sauerhering, « Belisar in Sage und
Kunst », dans: Repertorium für Kunstwissenschaft,
16, 1893, pp.289-295. Jon Whiteley, « Homer
abandoned: a French neo-classical theme », dans: The
artist and the writer in France. Essays in honour of Jean
Seznec, Oxford: Clarendon, 1974, pp. 40-51.
Michael Fried, Absorption and theatricality. Painting and
beholder in the age of Diderot, Berkeley, Los Angeles:
University of California press, 1980, pp.145-160 (Bélisaire
par David, pp. 145-160, Homer par David: pp. 175-178).
Klaus Weschenfelder, « Belisar und sein Begleiter »,
dans: Marburger Jahrbuch für Kunstwissenschaft, 30,
2003, pp. 245-268 (avec une liste détaillée). James
David Draper, « Chaudets Belisarius and a
Borrowing from David », dans: La sculpture en
Occident. Etudes offertes à Jean-René Gaborit, Paris:
Faton, 2007, pp. 226-231.
38 Lille, Palais des beaux-arts, P 436. 288 x 312 cm.
Réduction datée de 1784 au Musée du Louvre.
39 Nancy, Musée lorrain. La revue des arts et des
Musées de France, 9, 1959, pp. 31-36, fig. 5 (ni n°
dinventaire, ni dimensions cités). Cyfflé a aussi
composé Bélisaire recevant laumône, groupe en
biscuit (h: 34 cm, ibidem, fig. 7) daprès la
gravure dun tableau autrefois attribué à Van Dyck.
Les biscuits de Cyfflé furent édités encore jusquau
début du XXe siècle. Un exemplaire en biscuit, Lille,
Palais des beaux-arts, C 1547.
40 Los Angeles, Getty Museum, 2005.10. 35¾ x 29 in.
41 Besançon, Musée des beaux-arts. H: 15 cm.
42 Varsovie, Musée national.
43 Statues de chair, 1985, p. 169, no 21.
Lapaire, 2010, n° 370.
44 Correspondance I, 1984, p. 65.
45 Statues de chair, 1985, n° 116125.
Dessins de James Pradier dans les collections de
lEcole nationale supérieure des beaux-arts, cat.
exp., Paris, Ecole nationale supérieure des beaux-arts, 2006,
n° 29. Lapaire, 2010, n° 370.
46 Aix-en-Provence, Musée Granet, S 853.62. Alexandre
Maral, Sculptures. La galerie du Musée Granet, Paris:
Somogy, 2003 (Pradier, p. 143, cat. no 102).
Lapaire, 2010, n° 371.
47 Pendant son
séjour à la Villa Médicis, Pradier avait, sur deux grands
dessins, reproduit avec soin des statues et des reliefs où
de telles lyres sont représentées: Paris, Musée du Louvre,
Cabinet des dessins, RF 32572; Besançon, Musée des beaux-arts,
D 2097.
48 Rome, Musées du Capitole.
49 Rome, Vatican, Museo Pio Clementino. Dessin,
Genève, MAH 1852-84.
50 Paris, Musée du Louvre, MA 441.
51 Florence, Galerie des Offices, 249. Praxitèle,
cat. exp. Paris, Musée du Louvre, 2007, n° 55
52 Marbre, collection particulière. Reproduit dans Portraits
publics, Portraits privés 1770-1830, cat. exp. Paris,
Grand Palais, 2007, n° 109.
53 Rome,
Galleria nazionale di Palazzo Corsini. Reproduit dans Bertel
Thorvaldsen scultore danese a Roma, cat. exp. Rome,
Galleria nazionale darte moderna, 1990, p. 20, fig. 18.
54 Jules Canonge, Passim. Notes, souvenirs et
documents d'art contemporain, Paris: Tardieu, 1863, p. 27.
55 Louis Avennier, «J.-J. Pradier, statuaire», dans:
Pages d'art, 1922.
56 Statues de chair, 1985, n° 21.
57 Les prises de vues sont de François Benjamin
Lamiche et Félix Moulin qui les éditent aussi à leur
propre compte. Plus tard, dautres éditeurs de
photographies parisiens les exploiteront encore.
58 Catalogue des bronzes dart modèles et
épreuves composant la collection de M. Salvatore Marchi,
sculpteur, élève de Pradier. [Vente Paris, Drouot, 19
décembre 1856].
59 Charles et Dorrie Shinn, The illustrated guide
to Victorian parian China, Londres: Barrie and Jenkins,
1971, fig. 115, intitulée Biblical Group, sans
le nom de Pradier.
60 Schaffhouse, Museum zu Allerheiligen, P 225. Daisy
Sigerist, « Johann Jakob Oechslins Belisarius (1859) »,
dans: Revue Suisse dart et darchéologie,
38, 1981, pp. 141-150. Museum zu Allerheiligen,
Katalog der Gemälde und Skulpturen, Schaffhouse, 1989,
n° 64.
61 Schaffhouse, Stadtarchiv. Publiés par D. Sigerist,
voir note ci-dessus.
62 Lartiste, avec ses instruments de travail,
sappuyant sur sa statue de lEspérance,
placée à sa gauche. Plâtre, 1838. Copenhague, Thorvaldsens
Museum, A 162.
63 Bruxelles, Musées royaux, 69 x 59 cm. Acquise de
lartiste en 1866 par Léopold II.
64 Milwaukee, Art Museum, L 1888.5. 209 x 143 cm.
65 Nous navons pas pu trouver dimage du
marbre taillé vers 1900 par le sculpteur américain William
Ordway (1861-1930), représentant Homer récitant
lIliade. Une réduction en bronze, h: 14 ½ inch.
se trouvait en 1985 dans la galerie Hirsch and Adler à New
York.
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