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Sophie Picot-Bocquillon (Musée de l'archerie et du Valois, Crépy-en-Valois, 8/5/2008)
Je me permets, après un long silence, de vous consulter de nouveau sur Pradier, mais pas sur ses relations avec Duret...
Je participe actuellement à la préparation d'une exposition qui aura lieu en 2009 sur Madame Recamier au Musée des beaux-arts de Lyon. J'aurais aimé savoir si vous aviez des informations sur le médaillon de Mme Recamier par Pradier. Le documentaliste du musée de Lyon a trouvé la trace d'une correspondance sur cette œuvre dans un catalogue de vente dont voici la référence
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[Vente. Livres. 1895-05-27. Paris]
Catalogue d'une précieuse collection de lettres autographes provenant en partie des papiers de Madame Récamier, dont la vente aura lieu à Paris, Hôtel des Commissaires-priseurs, rue Drouot, salle n° 8, le lundi 27 mai 1895, [...], par le ministère de Me Delestre, commissaire-priseur [...], assisté de M. Etienne Charavay, archiviste-paléographe, expert en autographes [...]. - Paris: E. Charavay ; Londres: J. Pearson, 1895 (Paris : Impr. L. Maretheux). - 32 p.
Titre pris sur la couv. - 150 n°. - Ex. annoté au crayon (prix et acquisitions d'Et. Charavay).
BnF Richelieu - Manuscrits occidentaux - magasin CV-1444 (BIS).
§ N° 100 (p. 23) :
Pradier (Jean-Jacques, dit James), célèbre sculpteur, membre de l'Institut.
L.a.s. à Madame Récamier. 1 p. in-8°.
« Jolie lettre relative au médaillon de Madame Récamier. » (p. 23).
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Avez-vous eu connaissance d'une telle relation? Auriez-vous une piste à me conseiller?
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Douglas Siler (17/5/2008)
Cela m’a fait plaisir d’avoir de vos nouvelles et c’est avec plaisir que je réponds à vos questions. Je connais le catalogue de la vente Charavay que vous avez trouvé, l’ayant signalé dans mon édition de la Correspondance de Pradier, t. III, p. 253. Une longue note à la même page, complétée par une autre, p. 396, résume à peu près tout ce que je savais à l’époque sur le médaillon de Mme Récamier. Ces notes citent en particulier le livre de Jean-Paul Clébert, Louise Colet ou la Muse, 1986, p. 94 :
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Il faudra [disait Mme Récamier à Louise Colet] que vous m’emmeniez un jour chez votre ami Pradier pour qu’il fasse de moi un médaillon d’après le buste de Canova… et les indications que je lui donnerai moi-même.
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Or, pour imaginer ce dialogue Jean-Paul Clébert s’est probablement inspiré de la lettre de Pradier vendue chez Charavay en 1895. Cette même lettre a refait surface à la vente Drouot du 27 octobre 1938. Le catalogue de vente en donne non seulement un résumé mais aussi le frgment suivant:
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Mme Colet m'a dit [...] quel était votre désir au sujet de ce médaillon. Je vais m'en occuper et serai charmé de faire quelque chose qui vous soit agréable, mais à cette condition qu'il n'y aura ni remerciement, ni récompense.
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Je dois la découverte de cette deuxième vente à Claude Lapaire, qui la cite dans son catalogue raisonné de Pradier (à paraître prochainement) en signalant trois exemplaires du médaillon:
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Plâtre teinté façon terre cuite, diamètre: 24 cm. Signé et daté « J. PRADIΣR 1846 ».
Inscription en cursive dans le champ: « Madame Récamier ». Inscription à l’encre sur le carton fermant le revers: « Donné par Mme Récamier à la Marquise de La Grange le 28 décembre 1846 ». Paris, coll. part. [La romancière Constance de Caumont La Force, marquise de La Grange, 1801-1869, était une amie de Lamartine].
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Marbre, vente Paris, 15 mars 1860, n° 20. Ancienne coll. Charles Lenormant.
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Plâtre, diamètre 24 cm, Paris, coll. part. en 2006.
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Dans sa notice consacrée au médaillon, Claude Lapaire mentionne que Pradier s’est inspiré d’un buste que Canova avait modelé de Mme Récamier en 1813. Celle-ci, précise-t-il, avait refusé le marbre que voulait lui offrir Canova, qui le transforma en une figure de Béatrice par l’adjonction d’un rameau d’olivier dans les cheveux. Cette version révisée, conservée aujourd'hui au Musée des beaux-arts de Lyon, a été remise à Mme Récamier en 1823, après la mort de Canova. Pradier, dans son médaillon, ne reprend pas l’olivier et s’inspire davantage du plâtre originel de Canova conservé à Possagno. Sans doute suit-il aussi un portrait de Juliette en Vestale, gravé en 1803 d’après Richard Cosway.
Il semble en fin de compte que Pradier n’ait eu de contacts avec Mme Récamier que pour l’exécution de son médaillon. Si mes souvenirs sont bons le livre de Françoise Wagener n’en mentionne pas d’autres. Mais pour aller plus loin il faudrait voir les sources citées dans sa bibliographie, notamment les archives Louise Colet.
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Sophie Picot-Bocquillon (9/6/2008)
J'ai transmis vos précieux renseignements à l'équipe du Musée des beaux-arts de Lyon qui est enthousiaste! L'idée d'emprunter le médaillon en plâtre patiné terre cuite de Juliette a alors émergé. Malheureusement, le musée de Lyon n'a pas les coordonnées de Claude Lapaire Vous serait-il possible de nous les donner pour que nous puissions lui proposer de faire l'intermédiaire avec le collectionneur qui conserve cette œuvre? A toutes fins utiles, je joins un descriptif de l'exposition, qui sera présentée du 27 mars au 29 juin 2009 au Musée des beaux-arts de Lyon (cliquez ici pour ouvrir ce document).
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Douglas Siler (12/6/2008)
Merci bien pour le descriptif, votre expo a l’air vraiment passionnant. J’ai écrit à Claude Lapaire qui m’a répondu qu’il servira volontiers d’intermédiaire pour le prêt du médaillon. Je me suis trompé en vous disant que le fonds Louise Colet était mentionné dans le livre de Françoise Wagener. En fait, c’est Jean Bruneau qui en a publié des extraits dans le premier volume de son édition de la Correspondance de Flaubert, Bibl. de la Pléiade, 1973, p. 807 et suiv. Il ne cite pourtant que des passages ayant trait à Flaubert dans les « Memoranda » de Louise Colet et dans les lettres adressées à Flaubert par Maxime Du Camp. Ce fonds se trouve au Musée Calvet à Avignon. Malheureusement je n’ai jamais eu l’occasion de le dépouiller. Qui sait s’il ne contient pas des choses intéressantes sur Madame Récamier?
J’ai néanmoins écrit dans le temps à Mme Wagener pour lui demander si elle avait des informations sur les relations entre Madame Récamier et Pradier autres que celles qu’elle donne dans son livre. Elle m’a signalé alors l’existence au département des Manuscrits de la Bibliothèque nationale de plusieurs lettres de Louise Colet à Madame Récamier dans les fonds N.a.f. 14083, 14092 et 14100, en mentionnant également, dans ce même fonds, je crois, des lettres de Ballanche. Encore une piste, hélas, que je n’ai pas pu suivre.
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Sophie Picot-Bocquillon (13/11/2008)
Grâce à vous, le musée de Lyon est entré en contact avec Claude Lapaire qui a très volontiers joué les intermédiaires avec les propriétaires du médaillon représentant Juliette Récamier. Ils ont malheureusment refusé le prêt de l'œuvre et la mise à disposition par Claude Lapaire de sa photo. C'est très frustrant, j'aurais tant aimé voir cette œuvre. J'utiliserai quant à moi les informations que vous avez eues la générosité de me transmettre, dans mon article sur les rapports entre Juliette et ses portraitistes...
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Sophie Picot-Bocquillon (4/1/2009)
Je suis actuellement absorbée par la conclusion de mon article sur Mme Récamier et ses portraitistes. J'évoque dans cet article certains éléments que vous m'avez transmis sur Pradier, malgré l'absence du médaillon dans l'expo. Je souhaiterais savoir si je puis citer les propos précis de Pradier d'après le fragment de lettre réapparu lors de la vente Drouot du 27 octobre 1938, de même que les trois médaillons repérés par Claude Lapaire dans son catalogue raisonné à paraître prochainement.
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Douglas Siler (15/1/2009)
N’hésitez pas à utiliser ce que j’ai publié dans mon édition de la Correspondance de Pradier ainsi que le fragment de lettre tiré du catalogue Drouot. Pour les trois médaillons repérés par Claude Lapaire, mieux vaut demander son autorisation car le catalogue n’a toujours pas paru et ne paraîtra peut-être pas avant la fin de cette année.
Avez-vous eu l’occasion de compulser les lettres de Louise Colet à Mme Récamier conservées à la BNF, ou le fonds Louise Colet conservé au musée Calvet à Avignon?
Quel dommage que les propriétaires du médaillon refusent son prêt ainsi que la mise à disposition de sa photo par M. Lapaire. Faute de mieux, ne pourriez-vous pas utiliser la photo reproduite dans l’ouvrage du duc de Castries, Madame Récamier, égérie de Chateaubriand ?
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Sophie Picot-Bocquillon (16/1/2009)
Encore une fois, merci pour tout. Je ne manquerai pas de vous envoyer un catalogue de l'expo. Nous n'allons pas reprendre la photo de l'ouvrage de Castries car les descendants ayant refusé, il paraît gênant au musée d'utiliser un moyen « détourné ». A mon grand regret, je n'ai pas eu l'occasion de compulser les lettres et fonds d'archives que vous m'aviez indiqués.
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Douglas Siler (23/3/2009)
Pour voir une présentation et des vidéos de l'exposition Juliette Récamier, muse et mécène, cliquez ici et ici.
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